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À cause de la désertification médicale, les délais d'obtention pour un certificat de décès sont parfois longs. Faute de médecin disponible, des gens peuvent attendre plusieurs heures, voire même parfois plusieurs jours pour que leur proche défunt soit pris en charge et puisse enfin accéder aux obsèques. Le Monde en a rapporté quelques témoignages.
En France, obtenir un certificat de décès peut être un véritable parcours du combattant. Tel qu'on le sait, la France est un pays disposant d'une administration très forte et complexe, alambiquée diraient même certains. La mort n'échappe donc pas au système : pour pouvoir offrir des obsèques à un défunt, il faut en premier lieu mettre la main sur un certificat de décès, qui doit être délivré par un médecin. Une fois le papier en possession, les pompes funèbres peuvent enfin intervenir.
Cet imbroglio théorique n'est pas sans conséquences pratiques et Le Monde en a rapporté quelques cas sélectionnés dans la presse régionale. Pour Stéphanie Rodrigues, trois jours ont été nécessaires pour obtenir le certificat de décès de sa grand-mère, éteinte le 24 décembre 2017 à son domicile à Villeneuve-le-Roi (94), peut-on trouver dans Le Parisien. En mars dernier, il avait fallu deux jours pour l'obtention d'un certificat de décès d'un homme de 63 ans, mentionnait La Voix du Nord. En mai, la famille d'une dame de 80 ans avait lutté durant plusieurs heures pour récupérer le certificat. Même le New York Times s'est penché sur cette situation dramatique au travers d'un article.
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En dehors d'un appareil administratif complexe, la France souffre également d'un autre mal : les déserts médicaux. En milieu rural par exemple, 49% des patients ont du mal à avoir accès à un médecin, rapportait un sondage Viavoice pour la Fédération de l'hospitalisation privée. À La Gresle dans le département de la Loire (42), le maire s'est démené pour trouver un médecin après le décès d'un pensionnaire d'un Ehpad. « J'ai dû contacter le sous-préfet de garde, qui a contacté l’Agence régionale de la santé, qui a contacté les gendarmes, qui ont dû se rendre physiquement au domicile du médecin pour lui demander de venir. Et encore, il peut refuser ! Vous vous rendez compte du nombre de personnes que ça implique ? » s'interroge-t-elle.
C'est pourquoi elle a décidé de réagir de façon quelque peu « absurde » pour dénoncer la gravité de la situation, a-t-elle rapporté à Paris Match. Cette dernière a pris un arrêté début décembre pour interdire à ses habitants de mourir à leur domicile le week-end et les jours fériés. En effet, « sur les onze communes environnantes, il n'y a aucun médecin de garde », s'alarme-t-elle.
En outre-mer, la situation est bien similaire, voire pire. « Ici, c’est un vrai sujet de santé, des milliers de personnes sont impactées par cette situation. Les gens attendent cinq, dix, voire vingt-quatre heures pour obtenir un certificat », allègue Ericka Bareigts, députée de la Réunion. « A minima, on devrait avoir le droit de mettre le corps sur une plaque froide pour qu’il ne se décompose pas le temps de trouver un médecin. À La Réunion, il fait entre 35 et 40 °C durant l’hiver continental, donc en deux ou trois heures les corps commencent à gonfler. Quand, en plus de la mort, vous voyez le corps de la personne que vous aimez se décomposer sous vos yeux, c’est insoutenable », ajoute-t-elle.
Pour répondre à cette problématique, un amendement avait été déposé par l'élue et quelques députés pour permettre la rédaction du certificat de décès aux infirmières. L'idée avait en outre déjà été proposée par les sénateurs LR Patricia Morhet-Richaud et Alain Milon en 2017, mais avait été rejetée par l'Assemblée nationale au mois de mars. En échange, l'institution avait autorisé le recours aux internes et, sous conditions, aux médecins retraités. « C'est une blague. Très peu de retraités vont vouloir faire ça, et, sur un territoire qui manque de médecins, les internes sont déjà débordés par les vivants ! » s'insurge Ericka Bareigts.
Il faut dire que le personnel médical n'est guère encouragé à se déplacer pour la rédaction d'un certificat de décès. Tout d'abord, une telle intervention n'est pas rémunérée, excepté depuis 2017 le week-end et le soir après 20 heures ou dans les zones manquant de médecins. Ces derniers sont déjà débordés par leurs patients.
Ainsi, Jacques Battistoni, président de MG France, premier syndicat des médecins généralistes, recommande la mise en place d'une garde médico-légale et la participation de tous les médecins, et pas seulement les généralistes. « C'est une responsabilité collective qu'on ne peut attribuer uniquement aux médecins généralistes. N'importe quelle spécialité médicale peut s'en occuper. Dans de nombreux pays, les certificats de décès sont signés par les médecins légistes », explique-t-il. Mais si le phénomène de désertification médicale ne recule pas, il sera difficile de ne pas faire patienter les morts, ou même d'empêcher les Français de renoncer aux soins.
Dernière mise à jour : le 11/03/2024